Loi Descrozaille : pourquoi miser sur la préférence de marque ?
Avec Raphaël Julia - 11 mars 2024

La loi Descrozaille, entrée en application depuis le 1er mars 2024, bouleverse le monde de la promotion en mettant fin aux réductions chocs sur les produits du secteur DPH (Droguerie, Parfumerie, Hygiène). Dans ce contexte, les marques doivent repenser leurs stratégies promotionnelles, et plus globalement leur approche marketing, pour rester compétitives.
Accompagné de Raphaël Julia, directeur-conseil au pôle Shopper Experience de Bespoke, nous faisons le point sur la situation, et nous vous proposons des solutions pour se démarquer !
LOI DESCROZAILLE : SES IMPACTS DANS LE MONDE DE LA CONSOMMATION
Avec cette loi, c’est l’ensemble des acteurs de l’écosystème commercial qui est impacté. Pour les consommateurs, la fin de ces offres du type “- 60% de remise immédiate” ou encore “un produit offert pour un acheté” accentue de nouveaux comportements déjà observés avec l’inflation : baisse des quantités achetées, consommation de marques différentes, fréquentation d’enseignes et de circuits alternatifs.
« La conjoncture annuelle de 2023 dévoilée par NielsenIQ début février a mis en évidence l’impact de l’inflation sur les habitudes de consommation des foyers français. Alors que 20 % d’entre eux se considéraient « fragilisés » par le contexte économique fin 2021, ce chiffre atteint 55 % deux ans plus tard. »
Pour les distributeurs, le challenge est de s’adapter face à ces nouvelles habitudes de consommation. Même s’ils ont déjà opéré certains changements, notamment en diversifiant leurs gammes produits avec des MDD (marques de distributeurs) de plus en plus qualitatives, responsables, et spécialisées, attirer les consommateurs en magasin reste un défi majeur, surtout avec la montée en puissance des hard-discounters.
“Une partie de la population se dirige déjà vers les magasins hard-discount pour certains produits non alimentaires. Cet écart prix entre le hard-discount et les distributeurs classiques risque de s’amplifier”, souligne Raphaël Julia.
Dans ce contexte, les marques n’ont d’autre choix que de s’adapter. Elles doivent, dès à présent, se tourner vers des solutions alternatives si elles ne veulent pas perdre des parts de marché.
COMMENT LES MARQUES S’ADAPTENT-ELLES À LA LOI DESCROZAILLE ?
La loi restreint l’efficacité des offres financières dites “de remises immédiates”, les rendant moins attractives. Les marques peuvent utiliser d’autres stratégies promotionnelles avec des leviers financiers, notamment les remises différées qui existent sous de nombreuses formes aujourd’hui comme les offres de remboursement qui permettent de distribuer plusieurs bons de réduction pour un seul achat, un programme de cagnotte pour favoriser la fidélisation à travers des remises progressives…
Même s’il existe différents leviers promotionnels pour compenser cette perte de promotions immédiates, les marques doivent plus que jamais capitaliser sur leur image et leurs engagements afin d’atterrir dans le panier des consommateurs.
“Le critère prix va garder de l’importance, encore plus en période d’inflation, mais ce qui est aussi essentiel, c’est la préférence de marque« , explique Raphaël Julia. « Pour qu’une marque continue d’être achetée face à des MDD moins chères par exemple, il faut continuellement apporter des arguments pour prouver que tu es de meilleure qualité, ou apporter une expérience enrichie au shopper qui va s’appuyer sur le territoire de la marque, ses valeurs, ses engagements… »
LA PRÉFÉRENCE DE MARQUE COMME FACTEUR CLÉS DE DIFFÉRENCIATION MARCHÉ
La préférence de marque peut se travailler par plusieurs leviers, aussi bien promotionnels qu’expérientiels, afin « d’interpeller les shoppers et transmettre un morceau de l’ADN des marques et de leur utilité, notamment d’un point de vue sociétal ou environnemental. C’est ce qui va permettre de faire la différence en rayon”, ajoute Raphaël Julia. Au-delà des communications directement visibles sur le packaging, c’est le rôle des activations d’aujourd’hui de nourrir un territoire de marque, à travers des jeux concours, des éléments de visibilité différenciants en magasin…
En résumé, pour développer cette préférence de marque, il faut capitaliser sur le storytelling. L’authenticité, la naturalité, les innovations produits, sont autant de thématiques qu’il faudra exploiter pour se démarquer et mettre en avant sa marque. “Demain il faudra prendre de la hauteur pour faire passer des messages au consommateur, que ce soit dans les rayons à travers des promotions qui intègrent de l’émotion, mais aussi sur tous les autres points de contact de la marque. Il faut justifier la supériorité du prix, surtout en période d’inflation”, développe le directeur-conseil au pôle Shopper Expérience de Bespoke.
D’autant plus, dans un contexte actuel de “funflation” (contraction des mots fun : amusant, plaisir, et d’inflation), où malgré la situation économique, le plaisir dicte l’achat. “Il y a des marques qui sont consommées par plaisir, et qui résistent aux hausses de prix, car elles proposent des produits qui ne sont, en général, pas substituables », explique Raphaël Julia. « L’objectif est de faire en sorte que les marques deviennent des love brands, qui soient achetées pour leur image, au-delà même du simple usage et bénéfice du produit.”
Avec la fin des opérations promotionnelles, les marques n’ont plus d’autres choix que de soigner leur image, et engager davantage le consommateur, en proposant des expériences uniques et personnalisées. La préférence de marque se doit d’être au cœur des stratégies marketing pour attirer le consommateur, dans un premier temps, puis le fidéliser par la suite, surtout face à une concurrence de plus en plus importante.
